Sons of Anarchy

Réservé à un public adulte. Présentation garantie sans spoilers. Regardé en VO.

J'ai écris cet article au fil des saisons, il est donc plus narratif et personnel que d'habitude.


Jouer à Death Stranding il y a deux ans m'a rendue très intéressée par les motos et m'a fait prendre conscience que c'est un intérêt que j'ai toujours eu quelque part au fond de moi, depuis l'enfance, manifesté de manière subtile. Depuis, cet intérêt n'a cessé de croître... et ce malgré mon 1m46 à cause duquel je ne pourrais peut-être jamais conduire ma propre Triumph, ma Honda ou ma Yamaha.

En bonne fan de motos, de Death Stranding et de Walking Dead, j'ai dévoré l'intégralité de Ride with Norman Reedus, un documentaire que je recommande très chaleureusement. C'est passionnant, terriblement bien réalisé, varié et particulièrement instructif, en pleine immersion dans la culture biker et la culture américaine dans son ensemble, celle du quotidien et des passionnés, authentique et rarement mise en avant dans les fictions. Et les décors naturels ? Irréels. Je ne m'imaginais pas faire tout un article dessus mais je voulais quand même en parler, je suis donc très contente que Sons of Anarchy me donne enfin cette opportunité ! Et à ce sujet... 


Je connais l'existence de Sons of Anarchy depuis des lustres, sans surprise puisqu'il s'agit d'une série culte. Je la connais aussi parce que, au fil du temps, ma curiosité a été piquée par la présence de plusieurs acteurs de mes autres séries. C'est Kim Coates, par son personnage plus que magnétique de Walking Dead: Dead City, qui a enfin été la goutte qui a fait déborder le vase de ma curiosité... 

Tout ce que je savais de la série, c'est que ça parlait moto et c'est tout. Elle m'a toujours renvoyé cette aura mystérieuse, insaisissable, inaccessible, compréhensible que par ceux qui connaissaient vraiment. Un sentiment de club fermé à l'imagerie culte dont la symbolique et les détails m'échappaient, un sentiment presque étrange que seule cette série a pu me faire ressentir. 

J'en avais une image très mascu et virile qui me rebutait, mais la claque que je me suis prise avec Walking Dead et The Boys m'a appris à définitivement ne pas me fier à mes à priori. C'est donc un beau soir de 39 de fièvre que je me suis lancée dans cette aventure... qui m'a, à son tour, foutu une énorme claque.


Les Sons of Anarchy, également appelés SOA, SAMCRO (pour Sons of Anarchy Motorcycle Club, Redwood Original) ou encore Sam Crow pour la personnification qui joue sur l'homonymie, c'est un club de motards basé dans la charmante petite ville de Charming, Californie. Officiellement, c'est un club de passionnés qui a un business de garagiste. Officieusement... entre autres joyeusetés illégales, ils font du trafic d'armes et n'hésitent vraiment pas à tuer quiconque se met en travers de leur chemin.

Ouais, les membres de SAMCRO, c'est pas des rigolos. C'est des taulards, des criminels, des violents, des hors-la-loi, des meurtriers, des assassins. On va pas se mentir, le délire motard c'est bien plus le cadre général de cette série plutôt que son focus.

Sur le papier, c'est franchement pas mon truc. J'aime pas la violence gratuite et j'aime pas les séries où tu peux pas t'attacher aux personnages. Et pourtant, le constat est sans appel : j'ai été charmée dès le premier épisode et complètement conquise au troisième. Alors... pourquoi ? Qu'est-ce qui fait que Sons of Anarchy fonctionne si bien, même sur quelqu'un qui n'est pas prédisposé à un tel genre, et même près de 20 ans après sa diffusion ?

J'entre dans mon premier épisode et je suis assez perdue. Carrément perdue, même. Les personnages défilent. Un tas de jargon, de noms propres et d'acronymes inexpliqués s'enchaînent. Des factions qui me sont inconnues se font la guerre à base de deals que je ne comprends même pas à moitié. 

Sons of Anarchy démarre sur les chapeaux de roue, son univers est d'emblée impitoyable : tu t'accroche ou tu te casse. Ce qui m'a motivée à m'accrocher, outre la présence de mon cher acteur de Walking Dead, c'est l'humour. Peut-être que mon état fiévreux y était pour quelque chose, mais les deux premiers épisodes m'ont été... super drôles. Par certaines phrases ou situations mais aussi par le style général : tout était alambiqué, démesuré, brutal, à mille à l'heure. On aurait presque dit une parodie !

Et c'est là, le premier gros point fort de cette série : son sérieux dans sa démesure, son sérieux dans son non-sérieux voire son ridicule, son décalage, son rentre-dedans sans compromis. Ca vaut pour tout, et ça vaut aussi pour la violence. La violence de SOA n'est pas du tout grotesque et elle n'est que rarement gore, incomparable par exemple à The Boys, et les scènes brutales sont courantes mais utilisées à bon escient... mais je trouve quand même qu'il y a un petit quelque chose d'exagéré (notamment dans la totale quotidienneté des bagarres et tueries) qui permet d'alléger le poids de la brutalité, surtout dans la première saison qui se démarque un peu du reste.

Attention néanmoins, je ne dis pas que Sons of Anarchy est une parodie, une comédie ou un nanar impossible à prendre au sérieux, loiiiiin de là. L'humour et la démesure font partie intégrante de la série, mais autour de ça se construit tout un écosystème de lore, de personnages et de péripéties dramatiques qui est sérieux, captivant et nuancé, et parfois, très sombre, dur, cru et lourd.

Côté histoire, on voit le club évoluer, faire face à des problèmes juridiques mais aussi des conflits avec les gangs voisins. Des deals sont passés dans tous les sens, des alliances se forment pendant que d'autres virent à la trahison. Certains tuent leurs opposants d'un sang froid déstabilisant. Au milieu de tout ça, divers conflits internes et familiaux éclatent, menant à des remises en question, des actes dramatiques, de la rancœur justifiée ou non, de la malveillance... et beaucoup, beaucoup de mensonges. Des mensonges dans des mensonges, des secrets dans des secrets, qui provoquent des conflits de grande envergure et de nombreux décès. Sons of Anarchy est vraiment une leçon sur l'importance d'une communication claire, précise et honnête.

C'est une famille organisée sur un modèle patriarcal, profondément dysfonctionnelle et objectivement illégale et amorale à bien des égards, mais elle n'est, tout du moins en séparant la réalité de fiction, pas impardonnable. Avant d'être un gang de criminels, SAMCRO est une vraie famille. Les membres du club ont une alchimie évidente, un amour profond et une camaraderie qui fait rire aux éclats, émeut et réchauffe le coeur. Collectivement, ils forment un tout qui s'aime à presque toute épreuve et qui est badass au possible. 



Individuellement, chacun brille par ses compétences, sa personnalité, son humour, son style. Pour ne citer que mes grands favoris :

Chibs est une quintuple menace : écossais, cheveux gris et plus ou moins longs selon la saison, humour noir et ironique toujours intelligent, hyper positif, hyper protecteur. Opie est un géant au grand coeur, introverti, fraîchement sorti de prison mais loin de la vibe du motard taulard, il ferait tout pour sa famille de sang et tente de renouer avec sa famille de choix. Half-Sack est la jeune recrue qui doit encore faire ses preuves et qu'on bizute à longueur de journée mais qui en a bien plus dans le froc que son surnom, son jeune âge ou sa bouille trop mignonne laissent à penser. Bobby est la voix de la raison, l'oncle calme et pensif mais badass. Jax, jeune vice-président passionné, tente de remettre de l'ordre dans le chaos qu'est ce club, mais son impulsivité met des bâtons dans les roues de ses bonnes intentions. 

Si on avance un peu dans les saisons, on a le déstabilisant mais adorable Chucky, la reine incontestable qu'est Venus, et Nero. Le GOAT. Le greatest of all time. Le meilleur de tous les temps. Voilà. Côté femmes, c'est Tara qui a volé mon coeur, entre sa personnalité forte, son courage à toute épreuve et sa voiture aussi belle qu'elle-même.

Et enfin, Tig... mais par où je commence avec celui-là ? Bras droit du président, il est, euh... chelou. Constamment en chien. Avec des phobies loufoques et des, euh, préférences que je ne préfère pas vous révéler. Il est plutôt brutal, définitivement bizarre, sacrément imprévisible, complètement chaotique... et il est incroyablement expressif dans sa peine comme dans son amour, il est beaucoup trop drôle et attachant à en mourir. Et également un autre adjectif que je ne préfère pas dire publiquement (et qui s'applique tout autant à Chibs). Au secours. Sachez que j'ai écris cette partie quand j'étais dans la saison 3. Dans la saison 5 c'est dix fois pire. Et il m'en reste deux. Au. Secours. (Et promis juré, c'est loin d'être uniquement un biais envers le susnommé Kim Coates ou son personnage de Walking Dead. Promis.)


Si la brutalité générale de Sons of Anarchy marche si bien, c'est parce qu'elle est contrebalancée par ces personnages, nombreux, vivants et nuancés. 

Alors ouais, certains actes sont tout bonnement impardonnables même au sein de cet univers fictif, y'a tellement d'actes et de paroles problématiques et certains personnages me sortent par les trous de nez - mais cela n'enlève rien au charme de cette série, au contraire, ça le renforce car ça le nuance. Il est impossible de glorifier ces gens et leurs actes, surtout du point de vue de la vraie vie... mais le fait est qu'ils sont, irrévocablement, (presque tous) géniaux. 

On est chez des criminels, mais dans cet univers, les criminels (en tous cas ceux de SAMCRO) ne sont (généralement) pas des monstres. L'amour et le respect entre les membres sont indéniables et il en va de même pour leurs codes moraux clairs, notamment leur haine des nazis et du racisme en général ainsi que leur très grande réticence à dealer des drogues dures ou leur protection sans failles des femmes, des enfants et des civils innocents.

Que ce soit sexualité libérée, manipulation, trauma, métier, origine, vulnérabilité, hobby... dans la limite naturelle imposée par le format de la série, les spécificités de chaque personnage ne sont pas caricaturées ni utilisées comme un running gag ou un sujet de surface. Elles sont étudiées et développées, faisant partie intégrale de l'identité sérieuse du personnage. D'ailleurs, chaque personnage principal a ses propres scènes qui mettent en valeur sa personnalité et son histoire, et certains sont même au cœur d'arcs entiers qui mêlent leur existence personnelle aux problèmes collectifs du club.

Chibby à deux doigts de réprimander Jackie Boy, mais promis c'est pour son propre bien


Un univers pas si cliché que ça


Peut-être que dans cette partie on rentre un peu plus dans l'analyse-review que la présentation-recommendation. Je révèle quelques détails sur le fonctionnement du club et sur les détails de certains personnages, néanmoins sans jamais les nommer. On va parler masculinité, féminité et LGBT. Je spoil donc un peu de l'histoire mais ça reste vague. Libre à vous de lire ou sauter cette partie :)


-- Les femmes

Je ne suis pas une femme girly, mais ma plus grande peur était un aspect trop mascu et viril qui pouvait me déplaire et pire, me repousser intégralement en tombant dans un sexisme ordinaire ou une misogynie ouverte. Il est vrai que c'est une série au focus masculin, mon instinct a eu raison sur ça. On est également sur une organisation clairement patriarcale et traditionaliste : les hommes sont motards, criminels et membres actifs du club, tandis que les femmes ne font pas de moto et ne s'impliquent pas la vie du club, ou bien apportent leur aide plus indirectement, grâce à leur manipulation, leurs connaissances médicales, leur soutien émotionnel, et pour certaines, simplement au moyen de relations sexuelles.

Malgré cela, les femmes sont assez nombreuses et toujours respectées. Chacune a sa propre identité, son histoire et son autonomie. Et puis, elles aident le club par des moyens détournés, mais elles l'aident quand même, d'ailleurs souvent de leur propre initiative. Par ailleurs, les crow eaters, femmes qui gravitent autour du club pour des raisons principalement sexuelles, n'ont pas la même prestance qu'une old lady, femme mariée d'un membre, mais elles sont toujours respectées et libres de choisir leur partenaire du jour. Enfin, les violences faites aux femmes sont immédiatement dénoncées et très sévèrement punies. Tolérance zéro. Le sujet du viol, harcèlement et agressions sexuelles revient plusieurs fois et il est traité dans le plus grand respect et sérieux. 

Le système patriarcal du club n'est pas idéal mais il fait sens dans le contexte général de la série (qui se base sur la réalité des clubs de motards hors-la-loi) et n'est jamais un prétexte pour effacer, utiliser ou mépriser les femmes. Sur ce point, le club n'est pas parfait, la série ne met pas en scène un groupe de féministes engagés et c'est normal : il faut un minimum de réalisme, et la place pas tout à fait égalitaire des femmes fait partie de la dure réalité de cet univers, y compris dans la vraie vie. Les femmes secondaires, elles, sont nombreuses et presque systématiquement dans une position de pouvoir et d'autonomie : avocate, cheffe d'hopital, réalisatrice de porno, propriétaire et gérante d'un salon d'escortes, sheriff, procureure, prof...

La bikeuse fantasmée et femme que je suis est un peu triste de ne jamais avoir vu une seule femme sur une moto, néanmoins, autant le club que la série elle-même fait bien, bien mieux que ce à quoi on pourrait s'attendre d'un club de moto masculin et criminel des années 2000. 

Petit point auquel je viens juste de penser à ma énième relecture : j'ai adoré la diversité des femmes. Âge, apparence, ethnicité, style vestimentaire, style d'expression, attitude, mentalité... y'a vraiment de tout. Et vive la très grande différence de taille entre Opie et Donna à laquelle je m'identifie énormément !



-- Les hommes

Les hommes sont eux-mêmes dépeints d'une manière notablement intelligente et humaine. On est sur une bande d'hommes qui n'hésitent jamais à pleurer, à se faire de vrais câlins, de vrais bisous, de vrais caresses dans les cheveux, et à se dire qu'ils s'aiment, très fréquemment et très clairement, sans aucun détour, sans aucune once de gêne, d'ambigüité ou de "no homo".

Par ailleurs, un des gars se teint les cheveux de manière évidente puisqu'ils sont tantôt entièrement gris, tantôt entièrement bruns, et tantôt bruns avec des racines grises, qui sont parfois si longues que ça en devient des mèches laissées par choix stylistique. 

Promis, je ne fais pas un point stylisme sans raison : cela témoigne d'un confort aussi bien avec les cheveux gris qu'avec les colorations, un sujet encore moqué chez les hommes de nos jours, alors en théorie encore plus dans l'univers viril de Sons of Anarchy. Mon propos, c'est que le choix de ce gars et le fait qu'absolument personne ne le relève alors que c'est pourtant si évident, avec ce que j'ai dit juste avant sur l'affection, témoigne, aussi bien chez le gars lui-même que chez le club dans son ensemble d'une ouverture d'esprit générale et d'un rejet de la masculinité toxique, performative et traditionnelle. 

C'est magnifique à voir, tellement touchant et rassurant, tout particulièrement dans une période où, dans la vraie vie, les hommes sont de plus en plus violents, misogynes et homophobes dans leur expression de leur virilité, embrassant les clichés extrêmes et rejetant la nuance, la tendresse, l'émotion, et ce depuis un âge de plus en plus jeune. Sons of Anarchy fait tout le contraire. Et moi, ça me fait un bien fou.



Rien de tel que voir deux de mes trois plus grands chouchous s'aimer aussi clairement...


-- Un refuge queer inattendu


Contre toute attente, Sons of Anarchy possède tout un aspect queer.
Et qu'on soit clairs, je ne parle pas de mon interprétation, je parle de choses entièrement officielles. 

On a trois femmes bisexuelles (dont deux avec des relations vraiment montrées à l'écran), une femme transgenre et un homme à la sexualité clairement kinky, non-conventionnelle et ouverte en général. Ce dernier n'est pas directement identifiable comme LGBT avec nos définitions actuelles, mais il a montré par tout un tas d'aspects qu'il serait trop long de lister que le considérer comme hétéro ou tout du moins comme un hétéro classique, surtout dans le contexte traditionnel et rigide de cet univers, n'aurait aucun sens. Il vit dans une zone grise et peu définie, et il le vit très bien. Comme il le dit lui-même, il est "gay juste ce qu'il faut". En tous cas, il fait écho, très fortement et sur plusieurs niveaux, à ma propre expérience queer, et je l'adopte entière comme personne queer, certes sans label précis, mais définitivement pas hétéro. 

Les trois femmes bi restent bi jusqu'à la fin. Pas de changement d'avis, pas de confusion, pas de phase temporaire, pas de regrets, pas d'homophobie ni intériorisée ni de la part des autres, pas de choix final entre hétéro ou gay. Elles sont bi, point à la ligne. De nos jours, ces rhétoriques biphobes sont très, très communes. Voir l'inverse de tout ça, voir de la représentation positive, surtout en tant que femme bi moi-même, me touche énormément.

De son côté, l'homme plus ou moins queer n'est jamais utilisé comme blague. Les gens, et lui-même, peuvent parfois faire des blagues à ce sujet, mais il s'agit toujours de piques bon enfant (et vraiment drôles) entre meilleurs amis qui se connaissent très bien, comme on en a des tas d'autres sur des sujets différents. Sa sexualité n'est jamais moquée ou dénigrée par les autres personnages, ni par les scénaristes, ni par lui-même. Ce n'est pas une parodie. C'est une partie intégrante du personnage, du début à la fin, une partie réelle et sérieuse de son identité.

Tout cela est traité avec un grand respect, aussi bien de la part des personnages que des scénaristes. Leurs identités et expériences sont introduites sans ambigüité, de manières diverses et en étant parfaitement humain. La série ne tombe ni dans le tokénisme, ni dans la blague de mauvais goût ou la représentation bâclée, malhonnête, malsaine ou contre-productive. Ces personnes sont queer ou kinky et... c'est tout. Quelle joie pour moi !

Enfin, la personne trans, Venus... son introduction m'a foutu une de ces claques ! Je n'en dirais pas plus sur son parcours, mais en termes de personnage et de représentation, on est sur du très lourd, surtout pour l'époque. 

En 2012 je n'avais, comme la majorité de la société, qu'une vague idée de l'existence des personnes trans et des notions que ça implique. La même année, Sons of Anarchy a débarqué avec une femme trans immédiatement badass, attachante, drôle, sexy et ouvertement sexuelle mais de manière fun et bon enfant, sans fétichisation malsaine ni rejet quelconque, témoignant d'un respect, d'une bienveillance, d'une ouverture d'esprit et d'une compréhension du sujet juste dingues.

Et ça, c'est juste sa scène d'introduction. Je ne vous parle même pas de ses autres interventions, toutes plus mémorables et délicieuses les unes que les autres. Son histoire culmine avec le dialogue le plus humain, le plus touchant, le plus émotionnellement riche et mature de toute la série. Son identité n'est jamais dénigrée ou remise en question, pas par une seule personne, en dehors de sa propre famille que les Sons se chargent de suite de remettre à sa place. Venus existe, elle est vivante et radieuse, les gens l'adorent et certains sont attirés par elle, platoniquement, affectueusement, sexuellement ou romantiquement, sans honte ni objectification, l'aimant pour la personne qu'elle est avant tout. Elle est un humain normal et un humain trop cool, le tout avec un développement détaillé et une présence toujours bienvenue au sein du club. Juste avant de finir la série, j'ai lu cet article tout récent à ce sujet et ça m'a foutu les larmes aux yeux et n'a fait que confirmer à quel point tout ce qui touche à Venus est grandiose.

Tout le monde adore Venus et moi la première !!!!!

On retrouve également plusieurs formes de non-monogamie. Je ne vais pas développer plus que ça, toujours est-il que c'est un sujet qui me tient à coeur et me concerne directement. Représenté partiellement différemment de ce que je ressens personnellement, et représenté de manière pas exactement directe, mais représenté quand même.

Par ailleurs, d'autres sujets peuvent fair écho à certaines thématiques queer, comme le coming out mais pour d'autres types d'informations, la famille choisie, ou encore l'utilisation de prénoms et surnoms choisis sans presque aucune mention du prénom de naissance, une pratique unanime au sein du club. 


Écrire tout ça me fait ressentir une vulnérabilité profonde et je suppose que j'ai perdu les trois quarts de mes lecteurs, mais s'il y a bien un endroit où parler de ça est pertinent voire nécessaire, c'est ici. J'adore Sons of Anarchy et ces thématiques sont bel et bien présentes officiellement, et, par ailleurs, ma perception du monde et donc cette série ne peut exister en-dehors de ma propre expérience LGBT. Ma perception des divers types de relations, des dynamiques et des désirs est intrinsèquement non-hétéro, sensible à la bisexualité, l'asexualité, l'aromantisme, la non-monogamie/polyamour et la queerplatonicité, et, par empathie et connaissance, sensible aux autres types d'expériences non-hétéro. 


Entre les points irréfutables par leur officialité claire et précise et les points plus subtils que je perçois d'une certaine manière, pour moi, Sons of Anarchy est une série indéniablement LGBT / queer, ou queer-friendly, ou queer-coded, ou au grand minimum non-hétéronormative et progressiste, et ce à plusieurs niveaux et avec une régularité et une bienveillance spectaculaires qu'on a encore du mal à retrouver dans les séries produites de nos jours, près de 15 ans plus tard. 

Ceux qui préfèrent les séquences bien viriles, plutôt tradi et hétéro, n'ayez crainte : vous aurez de ça à foison. Mais au milieu de tout ça, il y a bel et bien plusieurs aspects LGBT et progressistes. Il est indéniable que Sons of Anarchy brise, à sa manière et dans une certaine mesure, les codes de l'hétéronormativité et de la masculinité toxique. Le tout dans un univers de motards et de criminels des années 2000. Si vous cherchez une série entièrement stéréotypée virile, hétéro, traditionaliste et unidimensionnelle, passez votre chemin. 


--------- fin de la parenthèse pseudo-analytique :)

Dans Sons of Anarchy, l'amour est au final le sentiment qui prime. Du filial au romantique en passant par l'affection platonique qui peut être intense et physique, les différents types d'attirance et même le sexe, sans oublier l'amour de la moto, du club, de la ville, des animaux, de la musique, de la vie... l'amour sous toutes ses formes n'est pas vu comme quelque chose de restrictif mais de libérateur et fédérateur, non pas rigide et exclusif mais fluide, varié, digne d'être exprimé librement et digne de se battre pour.

Avec ces personnages hauts en couleurs, Sons of Anarchy explore de nombreux thèmes du quotidien : parentalité à différents âges, famille de sang et de choix, différentes drogues, loyauté, trahison, adultère, industrie porno, passions et passe-temps, peurs et phobies, différents types d'amitié et d'amour, tendresse, deuil, taquinerie...

Un autre point fort de la série est sa bande-son orientée hard rock, punk rock, blues, americana. Dans l'ensemble ce ne sont pas des pistes que j'écouterai de mon plein gré, mais c'est parfait dans le contexte de la série car non seulement ça colle parfaitement à l'ambiance, mais en plus c'est rafraîchissant car ça se démarque bien des autres séries qui sont pour la plupart orientées pop, orchestral ou ambient. Quel dommage que Michael Malarkey n'ait pas pu faire partie de cette BO, il aurait tellement eu sa place !

Enfin, la cinématographie est elle aussi superbe. C'est dynamique et détaillé, on n'est pas sur du champ/contre-champ banal et statique ni sur des visages à moitié flous ou trop parfaits. Les scènes d'action sont parfaitement compréhensibles, les scènes dans le noir sont bien visibles, les plans qui mettent en valeur un personnage et les scènes qui les développent à merveille sont innombrables. Et certes ils ont décidé d'utiliser un filtre bleu pas très joli ni réaliste pour les scènes en Irlande, mais c'est compensé par le joli effet de vignette qui vient souvent ajouter du contraste à l'image. Bref, c'est super beau, c'est lisible, c'est créatif, c'est détaillé et c'est vivant.



Non, Sons of Anarchy n'est pas un chef-d'oeuvre. La construction est assez répétitive, un ou deux arcs sont un poil trop longs, perso je me perds un peu dans tous les deals et l'amour de la moto n'est vraiment pas assez mis en avant, celle-ci servant bien plus de moyen de transport que d'objet de passion et de voyage. Mais... et alors ? Les personnages sont profondément attachants et vivants, la moralité est nuancée, c'est badass au possible, c'est rempli aussi bien d'action que de narration et de coeur, c'est drôle, c'est touchant, intelligent, dynamique, dramatique, prenant... alors que demander de plus ?

Je n'aurais jamais cru que ça arriverait, mais SAMCRO est devenu une vraie famille pour moi. Je me suis retrouvée à tisser des liens très forts avec certains personnages et même à me projeter moi-même dans cet univers, d'une manière un peu trop immersive pour mon propre bien...

Sons of Anarchy, c'est une série qui te fait adorer des gens qui te feraient flipper dans la vraie vie. C'est une série qui te fait membre à part entière d'un club où tu tiendrais pas une seule journée. C'est une série irrévérencieuse, un univers brutal mais nuancé qui te fait dévorer les saisons plus vite que t'aimerais. Et bordel, qu'est-ce que ça fait du bien. Ce n'est pas une série dont on ressort avec tout un bloc-notes de citations, et pourtant son écriture est phénoménale.



J'ai écrit la grande majorité de cet article en n'étant qu'à la moitié du parcours.

Il y a une heure, j'ai terminé le dernier épisode. J'ai passé un quart d'heure à chialer, suivi d'un autre quart d'heure à regarder dans le vide. Et maintenant, je me demande ce que va devenir ma vie. Dans les heures qui ont suivi, j'ai écrit un récap privé de 2300 mots, soit 4 pages. 

Une masterclass de conclusion, remplie de tragédie, d'amour et de poésie, pour une masterclass d'aventure que je ne pourrais jamais oublier. Je suis sérieusement bouleversée, à la fois par les événements de la fin que par l'amour de toute cette aventure et par l'impact hautement personnel de certains personnages et de leurs thématiques. C'est un niveau d'affection et d'immersion que je n'ai d'habitude qu'avec les jeux vidéo. Les acteurs eux-mêmes disent que c'était pour eux une aventure unique qui a créé de vrais liens à vie, alors comment être coupable de ressentir la même chose envers leurs personnages ? Absolute cinema.

... et comme pour boucler la boucle, Kim Coates a liké mon tweet de remerciements. C'est stupide mais c'est comme si son personnage, mon préféré, mon Tiggy, avait réussi à briser le quatrième mur et me voir depuis sa dimension fictive... tellement con mais tellement touchant et surréaliste...

... et je viens à l'instant d'apprendre qu'aujourd'hui, jour de mon dernier épisode, nous fêtons les 70 ans de Jimmy Smits, l'acteur derrière mon adoré, mon angélique, mon légendaire Nero.

Non mais c'est quoi ce bordel.



I have no words. No words.

Doubt thou the stars are fire,
Doubt that the sun doth move,
Doubt truth to be a liar,
But never doubt I love.






Le mot de mon chat :

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